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COMMUNIQUE DE L'ASSOCIATION DES MAIRES DE FRANCE


Notre 92ème Congrès se tient dans des circonstances exceptionnelles marquées par l’inquiétude forte que suscitent les réformes proposées par le Gouvernement.

Le Congrès constate que les maires et les présidents de communautés sont aujourd’hui dans une situation à la fois inédite et particulièrement difficile. Confrontés à la crise, ils doivent en effet, dans un contexte financier de plus en plus contraint, se mobiliser pour en amortir les conséquences économiques et sociales. Dans le même temps, le Gouvernement engage deux réformes qui les concernent directement portant, d’une part, sur leur principale ressource fiscale, à savoir la taxe professionnelle, et, d’autre part, sur les collectivités territoriales.

Le Congrès estime que ces deux réformes, en l’état des textes présentés au Parlement, ne sont pas acceptables.

Il importe à cet égard que l’Etat cesse de tenir un double langage consistant à se méfier des élus locaux et à stigmatiser leur propension à dépenser tout en recherchant systématiquement leur concours et en leur transférant de plus en plus de charges nouvelles.

A cet égard, le Congrès tient à rappeler que les élus se sont massivement mobilisés dans le cadre du plan de relance en anticipant leurs investissements.

Le Congrès en appelle au Gouvernement et au Parlement pour que la place et le rôle des communes dans l’organisation territoriale de la République et leur fonction irremplaçable de proximité soient préservés, que la libre administration des collectivités locales soit respectée et confortée, et que leur autonomie fiscale et l’évolution de leurs ressources soient garanties dans la durée.

Le Congrès demande instamment à l’Etat qu’il prenne davantage en considération les attentes des élus qui, en métropole comme outre-mer, veulent participer à l’évolution et au développement équitable et durable des territoires urbains et ruraux et qu’il préserve les services publics.

Le Congrès attend de l’Europe qu’elle participe, à travers sa politique régionale, à la revitalisation et à la redynamisation des territoires urbains et ruraux, notamment les plus fragiles.

I - Garantir dans la durée l’autonomie fiscale des communes et des communautés et l’évolution de leurs ressources.

Le Congrès redoute que la réforme nécessaire de la taxe professionnelle et l’évolution des concours financiers de l’Etat ne mettent durablement en péril les moyens financiers et fiscaux des collectivités locales. Elles ne doivent pas se faire au détriment des ménages.

1-1 La réforme de la taxe professionnelle.

Le Congrès déplore que la réforme intervienne alors que les élus ne savent pas quels seront les champs respectifs de compétences des différents niveaux de collectivités territoriales.

Il se fait l’écho des plus vives inquiétudes que suscite chez les maires et les présidents des communautés une réforme qui, dans son état actuel :

- réduit le lien entre les entreprises et leur territoire d’implantation,
- affaiblit l’autonomie fiscale des communes et des communautés,
- engendre des disparités importantes de ressources entre les communes et les communautés,
- risque de se traduire à terme par un transfert de la charge fiscale locale des entreprises vers les ménages.

Le Congrès demande en conséquence une réforme claire et juste qui intègre :

- une augmentation significative de la part de la cotisation complémentaire sur la valeur ajoutée revenant aux communes et aux communautés et le maintien en contrepartie, au profit des départements et des régions, d’impôts ménages, sous réserve toutefois que les deux conditions impératives suivantes soient respectées :
- l’assujettissement de l’ensemble des entreprises dont le chiffre d’affaires est supérieur à 152 500 euros,
- l’instauration d’un taux unique pour toutes les entreprises assujetties. Ce dispositif permettrait de préserver une visibilité de l’assiette et d’assurer une répartition plus juste aussi bien entre les entreprises qu’entre les territoires ;
- l’assouplissement des règles de liaison des taux entre les impôts directs locaux pour offrir des marges de manoeuvre aux élus ;
- la suppression de la prise en charge par les collectivités locales d’une partie du plafonnement en fonction de la valeur ajoutée ;
- l’indexation des ressources diverses venant compenser la suppression de la taxe professionnelle ;
- l’organisation d’une véritable péréquation entre communes et communautés permettant de corriger les inégalités de richesse fiscale.

Le Congrès enregistre les déclarations faites et les engagements pris devant lui par le Premier Ministre de créer un fonds de péréquation, alimenté par une partie des progressions les plus fortes du produit de la contribution sur la valeur ajoutée.

Prenant acte de l’application de cette réforme pour les entreprises au 1er janvier 2010, le Congrès considère qu’il convient de reporter en 2010, et après l’obtention de simulations, le vote définitif des dispositions fixant le régime de dévolution et de répartition du nouvel impôt économique local.

Le Congrès demande au Bureau de l’AMF d’être vigilant, pour qu’en tout état de cause, et conformément à l’engagement du Gouvernement, les pertes de recettes entraînées par la réforme, pour chaque commune et chaque communauté, soient intégralement compensées par l’Etat dans la durée grâce à une juste indexation.

Le Congrès attache une particulière importance à ce que soit mise en oeuvre, dès 2010, une révision globale de l’assiette des impôts directs locaux et que soit rétablie, au plus vite, le niveau d’autonomie fiscale existant avant la réforme de la taxe professionnelle.

1-2 L’évolution des concours financiers de l’Etat.

Le Congrès considère que l’augmentation de 0,6 % en 2010 des concours financiers (hors FCTVA), c’est-à-dire inférieure à la hausse prévisionnelle des prix, s’inscrit dans un processus engagé dès avant la crise, préjudiciable à l’action des communes.

Il prend acte avec satisfaction

- de la décision du Premier Ministre d’assouplir, comme l’avait demandé l’AMF, le dispositif du versement anticipé du FCTVA mis en place dans le cadre du plan de relance, pour les communes qui n’auraient pu mandater en 2009 les dépenses d’investissement auxquelles elles se sont engagées, ainsi que de rouvrir l’application de ce dispositif en 2010 ;
- de l’acceptation par le Gouvernement du principe d’un retour intégral aux collectivités locales de la contribution climat énergie versée par celles-ci.

II - Préserver la libre administration locale et la fonction de proximité.

Le Congrès considère que les évolutions proposées par le projet de loi sur la réforme territoriale en termes de structures, de compétences et de gouvernance doivent conforter la République décentralisée. Ces évolutions doivent reposer sur la libre volonté et l’accord des élus, consolider la fonction de proximité en préservant les services publics locaux, le rôle des communes et les pouvoirs des maires, et la qualité d’intervention des agents publics territoriaux. Ces évolutions ne sauraient en outre imposer un cadre juridique trop uniforme et trop rigide.

Il demande :

- que le texte sur la répartition des compétences entre les collectivités territoriales soit connu avant le vote de la réforme territoriale ;
- que les communes continuent de bénéficier, pour la réalisation de leurs projets et de leurs investissements, de cofinancements du département, de la Région, de l’Etat et de l’Europe, dans les limites actuelles ;
- que les communes gardent la maîtrise des transferts de compétences aux structures intercommunales, qui doivent rester soumises à la règle de la majorité qualifiée ;
- que la carte de l’intercommunalité soit achevée d’ici la fin de l’année 2012 et refuse que l’Etat se substitue à la libre volonté des élus pour procéder aux modifications de périmètres et aux fusions de communautés ; il prend acte, à cet égard, de l’accord du Gouvernement pour que les propositions des commissions départementales de coopération intercommunale, prises à la majorité des deux tiers, s’imposent au représentant de l’Etat ;
- que le statut de métropole, qui ne saurait être approuvé dans sa rédaction actuelle, soit réservé aux seules agglomérations de dimension européenne pour exercer des fonctions stratégiques sans « vassaliser » les communes membres, qui doivent conserver leurs compétences de proximité et ne pas être privées de tout pouvoir fiscal et financier ;
- qu’aucune commune ne puisse être englobée contre sa volonté dans une éventuelle « commune nouvelle » et refuse qu’une incitation financière soit prélevée sur la DGF des communes ;
- que les pouvoirs de police du maire soient maintenus, notamment en matière de circulation et de stationnement.

Le congrès prend acte de l’avis favorable du Gouvernement, pour que la répartition des délégués des communes dans les conseils communautaires repose sur l’accord entre communes, les critères démographiques qui devraient figurer dans la loi n’intervenant qu’à défaut de consensus. Il demande que cet accord soit obtenu à la majorité qualifiée.

Le Congrès considère que les maires et les présidents de communautés de la région capitale doivent conserver la maîtrise de l’aménagement et du développement de leur territoire et demande qu’ils soient formellement et étroitement associés à la définition et la mise en oeuvre des dispositifs, des outils et des mesures accompagnant la réalisation des infrastructures de transports.

III - Accompagner financièrement les communes dans leur politique de développement durable.

Le Congrès rappelle que les communes et les communautés se sont depuis longtemps investies dans la protection de l’environnement et le développement durable, avec la mise en oeuvre de la « charte des maires pour l’environnement ». Dans le cadre des lois traduisant les conclusions du Grenelle de l’environnement, elles vont être conduites à intégrer de nouveaux objectifs liés à la lutte contre le réchauffement climatique, à la maîtrise de la consommation d’énergie et à la protection de la biodiversité.

Il demande que les communes et les communautés soient étroitement associées à l’élaboration des dispositifs, des schémas et des normes qu’elles devront prendre en compte, notamment dans le cadre du « Grenelle de la mer ».

Il demande également que les communes appelées à assumer les obligations liées à la création de « corridors écologiques » (trame verte et bleue) reçoivent une légitime et juste compensation.

IV - Conforter la politique de la ville.

Le Congrès considère que la situation économique et sociale qui prévaut dans les zones urbaines sensibles, où les populations risquent, plus que d’autres, de souffrir des conséquences de la crise, est à bien des égards, préoccupante.

Il demande en conséquence au gouvernement qu’il accélère la mise en oeuvre des nouvelles orientations de la politique de la ville décidées en 2007 et se donne les moyens d’assurer l’effectivité de la « dynamique Espoir Banlieues » dont les résultats se font attendre.

Le Congrès estime qu’une nouvelle réforme, qui viserait à supprimer progressivement les zonages et à réduire la géographie prioritaire, ne saurait justifier une diminution des moyens financiers et fiscaux qui lui sont actuellement consacrés.

Il estime en outre que la nouvelle géographie prioritaire doit être établie en étroite concertation entre l’Etat et les communes.

Le Congrès souhaite enfin que des garanties soient apportées sur le financement des projets de rénovation urbaine contractualisés avec l’ANRU et qu’un nouveau programme soit dès aujourd’hui envisagé.

V - Assurer un développement équilibré et durable des territoires ruraux.

Le Congrès demande à l’Etat de s’engager davantage pour développer et conforter les pôles d’excellence rurale, généraliser le très haut débit et garantir une couverture de l’ensemble du territoire par la télévision numérique terrestre sans surcoût pour les collectivités locales.

Le Congrès souhaite que les Assises des territoires ruraux débouchent sur des propositions concrètes d’action dans ces domaines, permettant de relancer une politique nationale d’aménagement et de développement de ces territoires, et de mettre fin au recul des services publics.

Il déclare qu’il faut, à l’opposé de ce qui se passe actuellement, créer les conditions permettant d’assurer un maillage territorial fort par les services publics dont l’évolution doit reposer sur l’information très en amont des élus, la déclinaison dans chaque territoire d’engagements de services publics garantis par des contrats territoriaux.

VI - Vers un autre modèle de développement dans les départements et territoires d’Outre-mer.

Le Congrès prend acte des orientations et des mesures arrêtées par le Comité Interministériel le 6 novembre dernier à la suite des Etats généraux de l’Outre-mer.

Il souhaite qu’elles permettent de répondre aux attentes des populations et des élus locaux, légitimement attachés à l’identité de chacun de leurs territoires et qui aspirent tout à la fois à un développement plus autonome et au maintien d’un lien fort avec la métropole pour construire une République plus fraternelle.

Le Congrès soutient les élus d’Outre-mer qui demandent la mise en place de moyens propres à privilégier les productions locales, à diminuer les importations et maîtriser les prix et réclament la suppression des obstacles fiscaux et douaniers qui entravent les échanges commerciaux avec leur environnement régional, source de débouchés importants.

Le Congrès considère que notre pays, fragilisé par la crise, doit s’attacher à maintenir sa cohésion sociale et son vivre ensemble, à mieux prendre en compte sa diversité sociale et culturelle et à offrir des perspectives à sa jeunesse.

La décentralisation constitue un atout irremplaçable pour la démocratie et un levier majeur de la croissance et de l’innovation. Il importe plus que jamais de la préserver. Pour que les maires en soient des acteurs encore plus efficaces et des partenaires à part entière, il importe également que les conditions d’exercice de leur mandat soient modernisées.

Le Congrès considère que l’année 2010 devra être mise à profit pour rechercher l’indispensable consensus républicain sur les deux réformes engagées par le Gouvernement.

Si cette offre de dialogue et de négociation ne recevait pas une réponse positive, le Congrès mandate le Bureau de l’AMF pour qu’il définisse et engage rapidement les actions qui s’avéreraient utiles.

La gravité de la situation et l’ampleur des réformes nécessaires nous interdisent l’inaction. C’est une part du destin de nos territoires et de leurs habitants qui est en cause.

C’est pourquoi le Congrès appelle les Maires et les Présidents de Communautés à rester vigilants et à se mobiliser pour renforcer notre République décentralisée.

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